mardi 3 mai 2016

drôle de naissance

  drôle de naissance

mon père m'avais dit que j'étais né 
un lundi fin décembre 1942,
à une heure tardive de la nuit, à l'approche de l'aube.
Il faisait un froid glacial. 
Ma mère avait des douleurs atroces 
au moment de l'accouchement.
Lalla abouche Elbounya était la sage femme 
qui avait l'habitude de s'occuper de ma mère 
d'autant plus qu'à cette époque, 
il était très mal considéré,
qu'une femme enceinte aille 
à l'hôpital public pour accoucher,
à cause des traditions observées à l'époque.
J’étais donc né dans les mêmes conditions 
que les autres enfants du quartier.
Ma mère me racontait qu'à la naissance, 
je n'avais pas émis le fameux cri de la vie, 
ce qui avait inquiété, lalla abouche, ma mère 
ma tante paternelle et ma tante maternelle. 
Ces deux dernières étaient présentes 
pendant l'accouchement.
Un second détail était l'absence d'une étoffe 

quelconque pour m'envelopper.
Ma tante maternelle, Elyaqoute, eut le réflexe rapide 
de déchirer l'enveloppe du seul oreiller 
qui se trouvait dans la pièce.
Un troisième détail était l'absence de toute nourriture 
pour donner à manger à ma mère. 
L'époque où j'étais né était caractérisée 
par le rationnement des denrées alimentaires 
puisque la seconde guerre mondiale faisait rage, 
et la priorité était donnée à l'armée française au front.
Enfin le quatrième détail était la grève de la faim. 
Je refusais de téter le sein de ma mère.
Au lever du jour, une voisine qui avait un nourrisson
vieux de quelques jours s'était portée volontaire 

pour tenter de me nourrir. 
Rien à faire, mon petit bec ne s'ouvrait guère.
Le calvaire que subissait surtout ma mère 

pesait lourd avec le temps.
Mon père était convaincu que j'allais mourir. 
D'autant plus que ma sœur aînée et mes deux frères 
qui m'avaient précédé furent décédés à un âge précoce. 
Résigné devant cet état de chose, 
mon père se rendit au cimetière
pour préparer la tombe qui devrait me recevoir 
au cas où je rendrais l'âme.
L'oncle maternel de mon père qui, par pur hasard, 

venait de la campagne, 
apporta avec lui une chèvre et son chevron, 
à titre de don,  ayant conscience 
que le rationnement de la nourriture en ville 
était dur pour ma famille.
Quand il eut connaissance de ma naissance, 
et du problème que posait mon refus de téter 
ni ma mère ni notre voisine,
campagnard qu'il était, 

pragmatique dans un certain sens,
il proposa à ma mère d'essayer avec la chèvre.
Qu'elle fut grande la surprise de constater 
que le nourrisson en grève de la faim,
ouvra enfin le bec,
 attiré par cette chèvre qui, avec la bénédiction divine, 
m'avait sauvé d'une mort certaine, 
en me donnant les premières gouttes de lait.
Qui pourrait le croire ou le deviner?
Quelle drôle de naissance!!!

hamid albachir almakki
08 mai 2009


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