mercredi 4 mai 2016

Ecole coranique Sidi Messoud

Ecole coranique Sidi Messoud 

La mosquée Sidi Messoud est située sur l'artère passante
qui relit Bab Doukkala à Riad Laarousse.
Elle se trouve en face du marabout Sidi Messoud 
et son cimetière.
Quand j'ai présenté le récit de ma petite soeur Halima,
j'ai relaté que sa tombe se trouve au cimetière Sidi Messoud.
Le quartier Arst Ihiri qui comprend le tombeau Sidi Messoud, le cimetière et la mosquée,
fait partie d'un ensemble d'extension 
de la médina de Marrakech.
Sa création ne devrait pas être ancienne.
Il est située entre les remparts
et le quartier Bab Doukkala. 
Il faisait partie d'une ceinture verte
qui desservait la médina 
en légumes, fruits, viandes et produits laitiers,
au cas où la ville se trouvait assiégée
par des envahisseurs.
L'urbanisation de Arst Ihiri ne devrait pas être antérieure
à l'avènement de la dynastie alaouite.
Le mode de financement des mosquées était de cinq sortes: 
* la mosquée fondée par un souverain,
* celle fondée par un vizir,
* celle financée par un notable,
* celle financée par une confrérie,
* enfin celle construite par un groupe d'habitants.
D'un autre point de vue, les mosquées diffèrent
par l'espace qu'elles occupent,
la complexité architecturale,
la richesse des revêtements décoratifs,
la composition des terrasses et leurs formes.
Elles diffèrent aussi par la nature 
et la qualité des tapis au sol.
La mosquée de prestige est un ouvrage très imposant
par ses dimensions, son espace et sa situation; 
les voûtes et vousseaux sont
supportés par des piliers et arcades;
les koubbas sont en boiserie vernie dite chqar,
souvent ciselée, 
les arcades sont revêtues de plâtre ciselé, 
les piliers sont, soit en pierres granitiques 
en forme de cylindre,
soit en colonnes de marbre, 
basées sur un socle souvent carré,
et terminées par un chapiteau à la naissance des arcades.
les lustres pendent chacun 
d'une rosace centrale d'une koubba,
l'ensemble est aligné selon les deux axes 
de symétrie des files de piliers.
le mihrab, sorte de cavité dans la muraille de la mosquée,
indique l'orientation vers la mekke, 
il a aussi une fonction de sécurité pour l'imam 
qui dirige la prière, 
surtout si celui-ci occupe une fonction 
administrative ou religieuse. 
Le mihrab est conçu avec le maximum de soin 
en architecture et en décoration.
L'arcade est souvent une ogive, 
résultat de l'intersection de deux arcs de cercle.
Les terrasses sont en pans inclinés revêtus de tuiles vertes
pour permettre aux pluies de couler vers le sol,
Elles sont revêtues soit de dess, 
un dallage en mortier constitué de chaux et d'argile, 
soit en bajmate fabriqué en terre cuite couleur nature, 
ou recevant, entre deux cuissons, un vernis coloré.
L'assemblage des éléments de bajmate 
est effectué à la main pour former
des lignes brisées donnant l'impression de vagues.
Cette description est très sommaire 
de ce que peut être une mosquée de prestige.
Les autres types de mosquée,
plus elles s'éloignent du standing décrit ci-dessus,
plus elles se trouvent réduites à de simples bâtisses
dont la fonction principale est de permettre aux croyants
de faire leurs prières quotidiennes, à l'abri des intempéries,
et d'écouter la khoutba ou sermon à l'occasion de chaque vendredi ou des fêtes religieuses.
La mosquée sidi messoud est de ce genre:
un portail en arcade dite sbaey,
c'est-à-dire construite sur la base d'un cercle
dont le diamètre horizontal 
est divisé en sept segments égaux,
l'ouverture du campas laissant tomber un segment,
deux arcs de cercles se rencontrent en pointe 
sur le cercle de base,
ce qui donne à l'arcade cette forme 
légèrement pointue dite ogive douce.
La porte en deux battants est composée de planches
en bois taillées grâce à des outils artisanaux.
Des clous à tête sphérique forment 
le seul canevas de décoration.
Le sol du hall d'entrée est légèrement incliné
et conduit vers la partie centrale de la mosquée.
Des piliers à section carrée chanfreinée,
émergent du sol sans socle à la base,
ni chapiteau au sommet.
Seul un simple dégradé indique le départ de l'arcade
du même style que celle du portail d'entrée.
Les plafonds limités par les arcades sont rectangulaires
et revêtus d'une gayza en bois 
constituée de chevrons et planches vernis
couleur marron sans le moindre ciselage.
Le mihrab est une cavité toute modeste.
Les sols sont en dess couleur beige
sur lesquels sont étendues des nattes en matière végétale
couleur nature, en guise de tapis pour la prière.
La présentation de la mosquée Sidi Messoud,
sommaire certes, a pour but de situer le cadre spatial
de l'école coranique où j'ai passé
une partie de ma première enfance.
Tout d'abord l'école coranique se trouvait
à la terrasse de la mosquée Sidi Messoud.
Pour y accéder, il faut entrer par le portail 
et traverser le hall.
Un escalier, immédiatement à droite,
conduisait vers la terrasse. 
Il était revêtu de dess beige,
avec des nez de marches en chevrons de bois 
arrondis au bord pour ne pas blesser les pieds,
car les élèves avaient l'habitude de venir pieds nus,
soit par tradition, soit par nivellement social
pour éviter toute discrimination quelconque.
arrivé à la terrasse, on trouvait l'école proprement-dite,
qui était un espace tout simple,
tout modeste, plus modeste que la mosquée;
cet espace était revêtu de dallage dess beige
tout craquelé par les intempéries,
sur lequel des nattes étaient étendues
pour permettre aux élèves de s'assoir accroupis
tenant sur les genoux,les pieds croisés,
une planche qui servait de tablette pour lire en premier stade,
et en second stade, pour apprendre à écrire.
l'encre était une sorte de liquide noirâtre,
appelé smekh, fabriqué au souk.
chaque fois que le contenu fut appris par cœur
et récité à haute voix devant le maître sy brahim,
les élèves lavaient les planches à l'aide de l'eau
et un produit d'argile bleuâtre, dit sensal.
j'avais quitté la garderie de sy mekki
immédiatement après le décès de ma petite soeur halima;
c'était une simple coïncidence.
ma tante lalla yaqut fut chargée de m'emmener
à l'école coranique de sidi messoud;
de même elle avait la charge de me récupérer
chaque fois que le muézin annonçait la prière du dohr;
à la différence du régime de la garderie
qui ne comprenait qu'une demie journée chez sy mekki,
à l'école coranique, lalla yaqut se devait de m'emmener
une seconde fois, l'après-midi, et de me ramener à la maison,
une heure passée après la prière du asr,
environ vers cinq heures. à signaler qu'à cette époque,
l'horaire GMT n'était pas appliqué dans l'espace social traditionnel;
c'était l'horaire local dit hassani.
les femmes n'étaient pas autorisées à pénétrer
dans l'enceinte de la mosquée;
du fait ma tante me confia à un élève plus âgé que moi,
fils de notre voisin, maallem abbas;
cet élève, de prénom ahmed, était autorisé par son père
à aller tout seul à l'école coranique;
il emmenait avec lui son frère mustafa
qui avait environs le même âge que moi.
la première fois, ce fut dur pour moi,
mais ahmed, grâce à son sourire et sa douceur,
sut me tranquilliser, quoique j'avais les larmes plein les yeux.
j'avais l'habitude d'escalader les escaliers de notre maison,
du fait ceux de l'école ne me posèrent aucune difficulté.
arrivé en haut de la terrasse,
je fis pour la première fois connaissance du maître d'école,
sy brahim qui était en même temps l'imam de la mosquée.
sy brahim était un homme âgé,
dépassant largement la soixantaine;
il avait deux beaux yeux dont la pupille était noir clair,
et la rétine était d'une blancheur sans faille.
les mouvements de sa tête m'intriguèrent;
mustafa qui avait déjà fréquenté l'école de quelques semaines avant moi,
m'informa que sy brahim ne voyait pas, c'est-à-dire qu'il était aveugle;
c'était la première fois que je me trouvai en face d'un aveugle,
et en plus avec des yeux ouverts qui ne laissaient pas deviner la cécité.
sy brahim était habillé en blanc,
et portait un turban de la même couleur que les vêtements.
il était assis, les pieds croisés,
le dot contre mur. autour de lui, en demi-cercle,
des élèves tous âges confondus, étaient assis,
eux aussi les pieds croisés, chacun tenait une tablette en bois, récitant à haute voix le contenu de sa planche.
ahmed se pencha doucement sur sy brahim,
mettant la bouche tout près de l'oreille du maître,
et lui murmura je ne sus quoi,
je compris juste que sy brahim m'accepta dans son groupe d'élèves.
la peau de sy brahim était blanche, 
il avait les joues rose clair; on ne voyait pas ses dents quand il parlait, 
mais sa voix était douce et agréable.
la plupart du temps, il observait un silence de méditation,
on voyait juste ses lèvres balbutier on ne savait quels versets du quran.
ce premier jour, je n'avait pas droit à une tablette, 
ce qui m'avait permis d'observer le comportement du groupe.
le jour suivant, ahmed me remit une tablette 
sur laquelle la fatiha était toute tracée; 
sy mekki m'avait bien appris auparavant l'alphabet arabe,
selon le script coranique, je n'eus pas donc d'obstacle
pour passer directement au stade de la lecture de la fatiha.
la première saison scolaire était achevée; 
j'avais appris deux des soixante hizb ou tranches du Saint Quran; 
mais je n'étais pas autorisé à écrire le moindre mot, 
compte tenu de mon jeune âge, 
je venais juste de terminer ma quatrième année.
durant cette saison scolaire, 
je n'avais jamais entendu sy brahim gronder,
ni l'avoir vu frapper un élève.
sy brahim était très respecté par ses élèves,
grands et petits, il était aimé par tout le groupe.
nos pères le consultaient sur des questions religieuses,
sy brahim leur donnait des conférences 
pendant les nuits sacrées du ramadan,
et souvent même des nuits ordinaires.
nos pères prenaient en charge , 
sans exception, tout ce dont sy brahim avait besoin. 
sy brahim était aimé par les habitants de tout le quartier arst ihiri.
la saison d'après, mon père prit la décision de m'inscrire 
à l'école du pacha pour affronter un nouveau régime scolaire, 
un nouveau monde, complètement différent 
de ce que j'avais vécu jusqu'à l'âge de quatre ans.
la prochaine feuille d'enfance tentera 
de relater le vécu durant mon séjour dans cette école.
  hamid albachir almakki
le 24/05/09 

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